Aller au contenu principal
Fermer

L'avenir des pêcheurs français entre les mains des négociateurs européens et britanniques
information fournie par Reuters 09/12/2020 à 17:20

par Pascal ROSSIGNOL

À BORD DU CHALUTIER NICOLAS-JEREMY, 9 décembre (Reuters) - D epuis deux jours, les frères Margolle traînent leurs filets entre les eaux britanniques et françaises, mais ils pourraient bien devoir y renoncer à brève échéance.

Nicolas, Jérémy et Vincent, pêcheurs à Boulogne-sur-Mer, tirent plus de la moitié de leurs revenus annuels du calmar, du cabillaud, du merlan et du rouget pris au large des côtes britanniques. Or, le 1er janvier, quand le Royaume-Uni quittera effectivement l'Union européenne, l'accès à ces eaux pourrait bien ne plus être garanti pour les pêcheurs des Etats-membres.

Les droits et les quotas de pêche sont l'un des trois points qui pourraient faire capoter les négociations sur les futures relations commerciales entre les deux parties.

Les pêcheurs français ont fait pression sur Emmanuel Macron pour qu'il ne cède rien sur ce point. Si Londres et Bruxelles parviennent à s'entendre in extremis, une réduction des quotas de prises dans les eaux britanniques semble inévitable, mais sans accord, les bateaux européens n'auront plus de libre accès aux eaux britanniques.

"Il n'y aura pas de gagnants", a déploré Nicolas Margolle, interrogé par Reuters dans la timonerie high-tech de son chalutier de 24 mètres, le Nicolas-Jeremy.

Ses collègues britanniques seront, selon lui, également pénalisés avec la reprise des contrôles aux frontières, qui affecteront les chaînes d'approvisionnement entre la Grande-Bretagne et le marché européen.

Le gouvernement britannique, qui veut retrouver le contrôle exclusif des droits de pêche dans ses eaux territoriales, en a fait un combat symbolique. La France, elle, a promis de ne pas sacrifier ses pêcheurs et menace d'opposer son veto si elle n'est pas satisfaite de l'accord qui pourrait être conclu.

Malgré son poids économique très limité, la pêche est donc devenue un enjeu politique majeur dans les négociations sur les futurs échanges commerciaux entre le Royaume-Uni et l'UE, qui représentent 1.000 milliards d'euros annuels.

PAS DE PLACE POUR TOUT LE MONDE

Les zones de pêche britanniques sont parmi les plus riches du nord-est de l'Atlantique et les pêcheurs européens sont actuellement autorisés à y exercer librement à condition de rester à six milles marins des côtes. A partir du 1er janvier, la zone économique exclusive s'étendra à 200 milles au large.

Si les bateaux européens n'y ont plus accès, ils se rabattront sur les eaux françaises, estime Nicolas Margolle. "Il n'y aura jamais assez de place pour tout le monde et la ressource, ça va être table rase", dit-il.

Au-delà des pêcheurs, ce sont des milliers d'emplois qui sont menacés dans l'ensemble de la filière en cas de "no deal" et les consommateurs en subiront eux aussi les conséquences.

Selon Tom Premereur, directeur de la criée Vlaamse Visveilingen d'Ostende, 54% des prises belges sont effectuées dans les eaux britanniques. Une rupture sans accord serait un désastre, dit-il. "Nous perdrions beaucoup de poisson, certainement le poisson de grande valeur."

Chez les Margolle, qui sont pêcheurs de père en fils depuis quatre générations, ont craint même que l'activité n'y survive pas. "On essaie de perpétuer la tradition mais ça devient compliqué", déplore Nicolas. Lui et ses frères, qui ont déjà renoncé à acheter un bateau plus moderne, ne savent pas s'ils pourront continuer à payer les traites de leurs emprunts.

(Avec Yves Herman à Ostende, version française Jean-Philippe Lefief, édité par Jean-Michel Bélot)

0 commentaire

Signaler le commentaire

Fermer

A lire aussi

  • (Crédits: Adobe Stock)
    information fournie par The Conversation 07.11.2025 10:10 

    Que font réellement ces analystes financiers, dits analystes « sell-side », au sein des grandes banques d'affaires ? Une étude consacrée à leur travail à travers les pratiques d'évaluation de la performance montre la complexité de ce métier finalement peu connu. ... Lire la suite

  • Des avions à l'aéroport de Madrid (illustration) ( AFP / THOMAS COEX )
    information fournie par Boursorama avec AFP 07.11.2025 10:04 

    Le groupe espagnol Amadeus, numéro un mondial des réservations de voyages, a vu son bénéfice net bondir de 10,1% sur les neuf premiers mois de l'année 2025, tirés par le dynamisme du secteur touristique et du transport aérien, notamment en Asie-Pacifique. Le géant ... Lire la suite

  • Capture vidéo datée de mai 2024 et fournie par le ministère de la Défense chinois du troisième porte-avions de la Chine, le Fujian ( CHINA'S MINISTRY OF DEFENCE / Handout )
    information fournie par AFP 07.11.2025 10:03 

    La Chine a annoncé vendredi la mise en service de son troisième porte-avions, son premier équipé d'un système de catapultes électromagnétiques, marquant un jalon crucial dans la modernisation de sa marine face aux Etats-Unis. Cette technologie moderne de catapultage, ... Lire la suite

  • ( AFP / CHARLY TRIBALLEAU )
    information fournie par Boursorama avec AFP 07.11.2025 09:59 

    Le groupe IAG, maison mère de British Airways et Iberia, a publié vendredi un bénéfice net en léger recul au troisième trimestre, pointant notamment "un certain ralentissement" pour ses vols vers les États-Unis, comme ses concurrentes Air France-KLM et Lufthansa ... Lire la suite

Mes listes

Cette liste ne contient aucune valeur.
Chargement...